Et si Gyptis et Protis, les deux époux à qui la légende attribue la fondation de Marseille, s’étaient finalement rencontrés à Saint-Mitre les Remparts, sur un promontoire gaulois avec vue sur l’embouchure du Rhône ? Les récentes fouilles archéologiques menées sur le site de Saint-Blaise, imposant oppidum situé sur la commune de Saint-Mitre les Remparts redonnent à penser la création de Marseille.
La légende est connue. Des marins grecs venus de Phocée, une princesse gauloise du nom de Gyptis. Une coupe de vin (ou d’eau, selon les versions) tendue à Protis, navigateur en chef, et voilà le mariage inattendu qui pousse les Grecs à fonder Marseille sur un territoire cédé en dot par le roi Nannos. Cet épisode mythique a conquis la mémoire collective et poussé archéologues et historiens à rechercher, à proximité de Marseille, la « capitale » des Ségobriges, ce peuple gaulois de la rive gauche du Rhône cité par les textes.
Les archéologues Jean Chausserie-Laprée, Marie Valenciano et Sandrine Duval pensent avoir trouvé à Saint-Blaise le site de la maison royale des Sébobriges. ” Le site de Saint-Blaise, pourtant fouillé depuis 1935, a longtemps été mésinterprété. On a voulu y voir une cité grecque, mettre en avant les colons et non les indigènes », assure Jean Chausserie-Laprée, conservateur en chef du patrimoine à la ville de Martigues. La faute, sûrement, à cette muraille datée du II e siècle avant J.-C., qui, avec ses 450 mètres de long sur 8 mètres de profondeur, s’impose aux 15 000 visiteurs annuels de Saint-Blaise. « Ce rempart en grand appareil reprend des méthodes de construction grecques, mais il a bien été bâti par des Gaulois », corrige l’archéologue, qui en veut pour preuve les techniques d’extraction des pierres dans la carrière voisine, « uniquement utilisées par des ouvriers celtes ». « La muraille a conduit à penser que la ville avait été créée après Marseille, comme un avant-poste. Mais le rempart s’appuie sur une enceinte primitive d’importance et la cité couvrait 5 hectares, comptait déjà une population dense et plusieurs dizaines, voire centaines, d’habitations quand les Phocéens ont accosté », assure-t-il. Les nombreuses céramiques retrouvées sur place confirment que les habitants du site échangeaient avec les marins étrusques et grecs dès le VII e siècle avant J.-C.. Une vraie capitale, donc, trouvant sa prospérité dans l’exploitation des marais salants. Et pour l’archéologue, le point de départ évident de l ’« essaimage urbain » qui donne naissance à Marseille.
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