Etude sur les pêcheries de l'étang de Berre (2017-2018)
Caractérisation de la pêche et de la pression de pêche
L'étude des pêcheries de l'étang de Berre, réalisée entre juillet 2017 et décembre 2018, a permis de mettre à jour les connaissances sur la pêche dans l'étang de Berre. Financée par le GIPREB, cette mise à jour a également permis d'ouvrir l'étude à la pêche de loisir.
Rapport sur l'étude des pêcheries
Le rapport sur l’étude des pêcheries est disponible en téléchargement :
Contexte
Au début des années 1900, l’étang de Berre était considéré comme une mer intérieure très riche, notamment en poisson. L’importance économique de la pêche était considérable et près de 300 pêcheurs vivaient de la pêche de la muge, de l’anguille et du loup.
Après de nombreuses années de pollution due aux rejets des raffineries, la pêche a été interdite en 1957 jusqu’en 1994. Plusieurs études (Le Corre et Garcia en 1988 ; Bonhomme et Ruchon en 2011) sur la pêche professionnelle ont montré une diminution du nombre de pêcheurs professionnels. L’étude de 2011 avait montré que la pêche de l’étang de Berre se caractérisait par un nombre limité de métiers de pêche, principalement représenté par la capéchade à anguille. Elle se distingue des autres pêcheries lagunaires de Méditerranée française par l’utilisation des filets calés et encerclant. En 2008 et 2009, 35 pêcheurs professionnels étaient alors en activité sur l’étang de Berre.
Entre 2017 et 2018, une étude de 18 mois a été mise en oeuvre pour mettre à jour les connaissances sur la pêche professionnelle de l’étang et ouvrir également l’étude à la pêche de loisir, qui, dans certaines régions, est loin d’être négligeable (étude du Parc Marin de la Côte Bleue). Cette étude a été conduite et financé par le Gipreb en partenariat avec les services d’Ifremer (et DPMA), de la DDTM des Bouches-du-Rhône, du CRPMEM PACA et les associations de pêcheurs de loisir. Elle a permis de compiler un volume de données inédit sur la pêcherie professionnelle et de loisirs de l’étang de Berre.
La pêche artisanale pratiquée sur le territoire de l’étang de Berre est appelée pêche aux petits métiers.
C’est une pêche traditionnelle et sélective : chaque espèce de poisson est pêchée avec un type de filet spécifique. C’est la pêche d’un type de poisson qui est appelée un métier. Ainsi, chaque pêcheur pratiquera différents métiers en fonction de sa zone de pêche et de la saison : les métiers de l’anguille, de la sole, de la daurade, du loup, etc.
Généralités
La flottille de pêche sur l’étang de Berre se compose de 65 navires en 2018. Ce chiffre est en nette augmentation depuis 2005 (31 navires) et 2011 (50 navires), signe d’un fort dynamisme de la pêche sur l’étang.
La pêche dans l’étang de Berre est essentiellement représentée par trois métiers :
- La pêche à l’anguille avec les capéchades ;
- La pêche à la daurade et soles avec les filets calés ;
- La pêche à la daurade et aux muges avec les filets encerclants ;
D’autres métiers, plus accessoires, sont également présents. Une diversification des métiers de pêche permet alors, en cas d’absence d’espèces cibles, de se replier vers d’autres espèces. Ainsi, la pêche aux cabassons (Atherina boyeri) à la senne de plage ou encore la pêche au loup (Dicentrarchus labrax) aux hameçons peuvent, à certaines saisons, pallier la diminution des anguilles ou daurades.
Les navires de pêche dans l’étang de Berre sont spécifiques à la pêche dans les étangs : de taille réduite (6.2 m en moyenne), de puissance moyenne (123 CV en moyenne) et équipé de roues hydraulique (70 % des navires) pour aider à la remontée des filets. Ces navires permettent de naviguer dans de faibles profondeurs en embarquant de lourds filets et lests. En 2018, 65 bateaux de pêche professionnels sont présents dans les 7 ports, et 2 autres viennent de ports extérieurs à l’étang (Port-de-Bouc). L’ensemble des navires montrent une activité au moins saisonnière dans l’étang, et la plupart des navires pêchent majoritairement dans l’étang de Berre.
A cela se rajoute la pêche aux coquillages : naissains de moules et palourdes, mais ne fait pas l’objet de l’étude.
Les captures de la pêche professionnelle
En partenariat avec le SIH (IFREMER, données DPMA) et lors d’échantillonnages sur les ports de pêche lors des débarquements, une estimation des captures a pu être effectuée. Entre 2008 et 2015, un total de 1 877 débarquements ont été observés par des observateurs halieutiques. Sur cette période de 8 ans, les captures moyennes (estimées à partir des observations et des déclarations d’activités) sont de 138.6 tonnes d’anguilles, 117 tonnes de muges (toutes espèces), 36.5 tonnes de dorades et 19.5 tonnes de loups. Les autres espèces représentent moins de 4 tonnes.
Le graphique ci-dessous décrit les évolutions temporelles de ces captures entre 2008 et 2017. Il met en évidence une forte augmentation des captures de muges et dorades en 2014. L’hypothèse de cette augmentation est la mise en place d’une réglementation sur la pêche à l’anguille, ayant entraîné un report de pêche sur ces deux autres espèces.
De manière plus générale, les tonnages pêchés sont très variables d’une année à l’autre et ne montrent pas de tendance particulière. Ils dépendent d’un complexe mélange des conditions climatiques et météorologiques et du fonctionnement même de l’étang de Berre et de son bassin versant. Cette forte variabilité des prises met également en lumière la fragilité de l’étang dans sa réponse aux pressions diverses.
L’essentiel des captures est vendu chez les mareyeurs (grossistes), mais la vente directe est tout de même présente dans certains ports.
Et la pêche de loisir ?
Une forte originalité de cette étude a été d’explorer la pêche de loisir. C’était une première sur l’étang de Berre.
De nombreux comptages et enquêtes ont été réalisés sur toute l’année 2018.
Les données récoltées témoignent de la prédominance de l’usage de la canne depuis le bord et particulièrement sur le secteur du canal de Caronte, avec la daurade comme espèce cible. Dans une moindre mesure et avec une saisonnalité très marquée l’effort de pêche se manifeste également par une pratique de traîne depuis des petits navires pour cibler le loup.
Sur la base des enquêtes réalisées, l’estimation de l’effort de pêche pour la daurade conduit à un tonnage compris entre 50 et 84 tonnes. Les observations et témoignages nombreux sur les pratiques de pêche dans ce secteur pourraient toutefois conduire à réévaluer ce chiffre par un facteur d’ordre 5 soit entre 260 et 470 tonnes, soit des valeurs bien supérieures à ce qui est déclarée par la pêche professionnelle.
Ces chiffres sont bien sûr à prendre avec précaution car ce type d’étude présente évidemment un certain nombre de biais, malgré le très important travail réalisé.