Les écosystèmes des lagunes côtières
Qu'est-ce qu'une lagune méditerranéenne ?
Interface entre la terre et la mer, les lagunes côtières méditerranéennes sont des milieux complexes qui remplissent de nombreuses fonctions écosystémiques. Elles sont généralement séparées de la mer par un cordon littoral appelé "lido" et communique avec la mer par une ou plusieurs ouvertures communément appelées "grau". L'étang de Berre est cependant différent : il n'y a pas de lido et il est relié à la mer par le canal de Caronte.
Cette page vous présente des généralités sur ces écosystèmes lagunaires. Les spécificités de l’étang de Berre sont détaillées dans la page suivante.
Description
A l’échelle mondiale, les lagunes côtières occupent près de 13 % du linéaire côtier et sont présentes sur tous les continents, excepté en Antarctique. En Europe, elles occupent environ 5 % des côtes et sont particulièrement importantes le long des côtes méditerranéennes. Sur la façade méditerranéenne française, on dénombre une quarantaine de lagunes (de plus de 100 hectares) auxquelles s’ajoutent de nombreuses lagunes de petite taille. C’est en France, 40 % du linéaire des côtes non rocheuses.
Échanges avec la mer et variabilité de la salinité
Réceptacle des eaux douces apportées par le bassin versant, les échanges avec la mer sont complexes. Ils peuvent être permanents ou temporaires et sont généralement à double-sens (lagune vers la mer et mer vers la lagune). Les forçages tels que la marée, les vents, la pression atmosphérique sont à l’origine des échanges entre la mer et les lagunes au niveau des graus. Ces même forçages contrôlent également l’hydrodynamisme des masses d’eau lagunaire.
Cette variabilité entre les apports d’eau par le bassin versant et les échanges avec la mer est à l’origine d’une grande variabilité de la salinité des eaux lagunaires, caractéristique essentielle de ces milieux. Certaines lagunes présentent des salinités entre 0.5 et 5 (eaux oligohalines) et d’autres jusqu’à plus de 40 (eaux hyperhalines). La bathymétrie et la morphologie des lagunes vont également induire des variabilités spatiales de cette salinité au sein d’une même lagune.
Les variations temporelles de ces échanges, à l’échelle saisonnière ou interannuelle, ont des conséquences importantes sur la salinité, et vont ainsi contraindre les différentes communautés biologiques de ces écosystèmes.
Eutrophisation et cycle des nutriments
Apports des nutriments
Les apports d’azote et de phosphore au sein des lagunes ont des sources multiples. Les différentes interfaces (bassin versant/lagune, atmosphère/lagune, mer/lagune, compartiment benthique/lagune) jouent un rôle essentiel dans le cycle des nutriments. Les apports d’azote et de phosphore dans les lagunes proviennent essentiellement des différentes rivières (tributaires) ou des apports diffus généralement lors d’événements pluvieux. D’autres apports existent cependant : les industries, les stations d’épurations ou encore les sources atmosphériques. Des échanges ont également lieu avec le compartiment benthique (sédiments).
Eutrophisation
Selon la commission européenne (1991) (91/271/CEE), l’eutrophisation correspond à « L’enrichissement de l’eau en éléments nutritifs, notamment des composés de l’azote et/ou du phosphore, provoquant un développement accéléré des algues et des végétaux d’espèces supérieures qui entraîne une perturbation indésirable de l’équilibre des organismes présents dans l’eau et une dégradation de la qualité de l’eau en question ». L’eutrophisation est l’une des causes majeures de dégradation des écosystèmes marins dans le monde.
De nombreuses lagunes (et lacs) sont impactées par cette problématique de l’eutrophisation, ayant pour conséquence un déséquilibre de l’écosystème dans l’ensemble de ces compartiments (planctons, macrophytes, macrofaune, poissons,etc…).
La meilleure compréhension du fonctionnement des lagunes, et de la dynamique des apports en azote et phosphore, est ainsi cruciale afin de définir les actions permettant de limiter ces phénomènes d’eutrophisation.
Les lagunes côtières sont des milieux très riches et sont classées parmi les écosystèmes les plus productifs dans le monde.
Ces écosystèmes constituent des réservoirs de biodiversité et de productivité écologique.
Ils jouent un rôle dans le maintien des stocks halieutiques marins en fournissant des zones de nurseries et de refuges essentielles pour de nombreuses espèces migratrices, comme la daurade. Ce rôle fonctionnel des nurseries est primordial pour la biodiversité ichtyologique des lagunes côtières mais donc aussi des zones côtières afférentes.
Services écosystémiques et intérêts socio-économique
Les lagunes fournissent de nombreux biens et services aux populations et sont donc au centre de nombreux enjeux socio-économiques.
Ces milieux très productifs permettent notamment la pratique de la pêche, de la pisciculture et de la conchyliculture. D’autre part, les lagunes sont composées de paysages remarquables permettant de nombreuses activités de loisirs (baignade, nautisme, etc….).
En complément, les lagunes jouent également un rôle écologique d’épuration et de filtration des eaux douces en provenance des bassins versants améliorant la qualité physico-chimique et bactériologique des eaux arrivant sur le littoral.
Les herbiers de zostères naines, "hot-spots" de biodiversité
La zostère naine Zostera noltei est une magnoliophyte marine pouvant former de grands herbiers, parfois associés à d’autres espèces de magnoliophytes telle que Z. marina, Ruppia cirrhosa ou Cymodocea nodosa.
Elle est dite « ingénieur d’écosystème », jouant un rôle de production d’oxygène, de nurserie et de nourrissage pour de nombreuses espèces. Ce sont de véritables “hot-spots” de biodiversité. Elle a également un rôle de protection contre l’érosion des berges en stabilisant le sédiment. Elle colonise les fonds sableux et sablo-vaseux de faible profondeur (0.1 m jusqu’à 10 m de profondeur) des biocénoses de « Lagune Euryhaline et Eurytherme » (LEE) et de « Sables Vaseux en Mode Calme » (SVMC) ) des lagunes.
Largement présente en France depuis le littoral de la Manche jusqu’à la frontière espagnole, on peut également la rencontrer sur les côtes méditerranéennes et corses, et dans des lagunes littorales telle que Thau ou Berre.
Le suivi des herbiers est un enjeu fort de compréhension de la dynamique de restauration de l’étang de Berre (voir article sur le sujet).