Face à la profonde dégradation de l’étang de Berre, les populations riveraines, les usagers et le monde associatif se mobilise. Cette mobilisation est relayée par le Syndicat intercommunal pour la sauvegarde de l’étang de Berre et les collectivités territoriales, avec en particulier l’organisation d’un référendum d’initiative populaire en décembre 1991 et la création d’un collectif d’associations.
Historique
Du Groupement d’intérêt public au Syndicat mixte
Conséquence de la volonté collective de réhabilitation environnementale de l’étang de Berre, le GIPREB (à l'époque, "Groupement d’intérêt public pour la réhabilitation de l’étang de Berre") a été créé en 2000 pour la période 2000-2006, puis reconduit à l’identique pour la période 2007-2010 afin de préparer son remaniement administratif et juridique. Dès sa création, la vocation du GIPREB a été de coordonner la reconquête de l'étang de Berre et de définir un programme global de réhabilitation. En 2011, le Gipreb a évolué vers une structure de syndicat mixte et il est aujourd'hui simplement dénommé "Gipreb Syndicat Mixte".
Dès sa création, la vocation du GIPREB a été de coordonner la reconquête de l’étang de Berre et de définir un programme global de réhabilitation. Dans ce cadre, deux missions essentielles ont été portées par le GIPREB, les études d’une part et leur appropriation par les acteurs à travers une démarche de concertation d’autre part. Il s’agissait ainsi d’améliorer la connaissance du milieu, de définir des objectifs de qualité, d’accompagner le développement des usages et d’orienter les actions de réhabilitation. Enfin, le GIPREB était identifié comme la structure porteuse de la démarche de Contrat pour l’étang de Berre, en vue de l’obtention de l’agrément définitif.
Le conte du GIPREB ou le mythe de ses origines
« L’enfant du désaccord »
Il était une fois….
C’est d’une histoire d’amour qu’il s’agit, passionnelle, conflictuelle, improbable, un peu immature aussi disent les vieux, à la fraîche, sous les platanes de la place, mais d’une histoire d’amour quand même…
Il était une fois, sur les rives de la Méditerranée, comme si souvent dans ces contrées, une belle femme, vibrante comme une sieste ensoleillée, fougueuse comme le mistral à ses heures, un tempérament de feu donc mais déjà fort meurtrie par des aventures destructrices. Une femme encore jeune, désireuse de changer son destin, attendrissante comme toutes les éclopées de la vie qui veulent croire, encore, malgré tout, en l’avenir…
Il était une fois, face à elle, un homme de fière allure, fils de grande famille, maniant le verbe et le savoir, certes souvent imbu de lui mais désireux malgré tout de réparer les dommages historiques des siens, car il se sait l’héritier de tous les abus de pouvoir. Il était superbe, tout auréolé de sa prestance de jeune bien né, de reconnaissances multiples, de pouvoir et d’argent. Il était la puissance, il se voulait sauveur.
Elle se fit plaindre, le convainc, le fit rêver, et, fille de métissage, le charma de toute la richesse de la mémoire locale, souvenirs de terriens, contes de pêcheurs, rêves de migrants. Bref, elle le séduisit. Il la prit mais se sentit aussitôt écrasé par sa demande pressante. Elle se donna mais se vécut aussitôt méprisée et manipulée.
Elle usa même de menaces, à l’occasion, quand elle le vit soudain trop fuyant, lui aussi, hélas, comme les autres… Elle voulait croire dans les promesses faites, elle voulait construire avec lui ses projets exaltants de renouveau ; elle s’accrocha comme à une bouée… Ils se confrontèrent… De rage, de lassitude aussi, de faiblesse peut-être, il lui dit un jour « Faisons un enfant ; nous l’appellerons GIPREB ; tu seras rassurée car nous aurons ainsi fort à faire, ensemble ; dés lors, je ne te quitterai pas. »
Ainsi naquit GIPREB… et les deux familles au grand complet se mirent à y croire.
Tout le monde était là. Toute sa famille à lui, même les nouveaux riches, parents par alliance, même les cousins éloignés désargentés, même les anciens patriarches, les notables locaux aussi. Toute sa famille à elle, nombreuse et bruyante, un peu perdue dans ce beau monde et ses manières codées. Seul fut refusé le petit neveu extrémiste… Tous se réunirent souvent au dessus du berceau et voulurent mettre la main à la pâte pour son éducation.
Comme de bien entendu, la dispute des parents continua, nourrie de rancœurs tenaces et de frustrations nouvelles. « Elle ne voulait pas l’écouter ! Elle gâchait tout avec son impatience ! », « Il prétendait tout savoir ! Il ne voulait rien ‘faire’ ! »… Mais tout de même, ils aimaient GIPREB, sans se l’avouer mutuellement et surtout sans le lui dire…
Et GIPREB grandit, tiraillé entre toutes ces volontés contradictoires, rejeté par les autres enfants – il est si différent ! – un vrai galopin, du vif argent, tête de mule selon ses maîtres… Vous savez comment c’est, un enfant : une éponge aux douleurs des parents, surtout quand elles sont tues. Et il en fait des tonnes, l’enfant blessé, pour répondre à la consigne tacite : « Tu vis pour nous réconcilier ! ». Il ne sait plus comment gérer tout ça, la douleur aiguë de maman, la fierté blessée de papa, leur incapacité à se reconnaître et surtout, surtout, le désastre de leur amour. Il se cogne sans cesse à l’impossible défi, il y pleure, il y crie, il y vieillit trop vite…
Mais, par chance, il est tenace. Ah ça, il aime la vie, ce minot ! et les rivages où il est né…
Il a pris le plus fort de ses parents, l’exigence d’excellence et l’autorité de papa, la générosité et l’espérance de maman… Alors, il cherche. Il cherche dans tous les nouveaux savoirs du monde, dans les sciences toujours inexactes et dans les écoles à penser ; il écoute les sages, ceux que son père a regroupés autour de son berceau et tous les autres, même les indésirables, les sociologues du lien, les artistes visionnaires, les guérisseurs de l’âme, les penseurs iconoclastes et les papys poètes, peut-être même des alter-machin-truc et des femmes aussi ! Et tous lui disent que c’est possible !
Et il trouve et il apprend à écouter les vérités derrière des vérités et des mensonges, et il comprend enfin qu’il n’y a pas de Vie sans désir, pas de vie sans amour, et que la sienne, bien chevillée au corps relativise toutes les haines… Qu’ils se débrouillent avec leurs brouilles dérisoires !… Il sait désormais qu’il est là.
Puis, il revendique haut et fort qu’on cesse un peu de parler de lui, de sa santé fragile et de son caractère difficile, pour s’accorder sur le Projet, sur l’avenir, sur le désir. Finalement, contre-vents et marées, il va son chemin. »
Elyane GALAN, Directrice du GIPREB (2000-2004)
Nota :
dans le rôle du Père, l’État ;
dans le rôle de la Mère, « la demande locale », les élus, les Collectivités Locales
dans le rôle du Projet : la Réhabilitation de l’Etang de Berre
et tous les autres dès lors reconnaissables…
L’histoire d’un désir
C’était l’histoire d’un désir de réhabilitation du plus grand étang marin d’Europe,
porté par les populations riveraines depuis plus de 30 ans…
C’était l’histoire d’un désir de développement durable,
qui réunirait autour d’une table tous les acteurs de la réhabilitation…
C’était avant tout une expérimentation… d’expérimentations !
Une innovation institutionnelle, une innovation écologique,
Une aventure ambitieuse, fortement exposée…
C’était l’histoire de ceux qui croyaient qu’il était possible de sauver l’étang
En dérivant les eaux du canal usinier d’EDF et en réouvrant le tunnel du Rove
C’était l’histoire de ceux qui n’y croyaient pas mais qui voulaient bien en parler…
C’était avant tout un lieu d’expression des différents points de vue
Où tous les usagers seraient enfin réunis pour « internaliser » les conflits :
Pêcheurs, associations, industriels, Elus, Etat, Agence de l’eau,
Mais n’était-ce pas pour certains, dans ces temps cyniques, une réponse ambivalente?
C’était l’histoire de ceux qui s’y étaient engagés, mais l’étaient-ils vraiment ?
Manipulation, faux-semblants, discours,
C’était l’histoire de concertation et de démocratie locale
C’était avant tout un essai de compromis et d’élaboration de contradictions
du politique au scientifique, du local au national
Dans une structure qui se voulait opérationnelle
Hors du cadre connu du fonctionnement institutionnel
C’était l’histoire de l’étude d’un milieu aquatique
A l’état de santé bien alarmant
C’était l’histoire de la recherche d’un retour à la vie, d’une réponse biologique d’un milieu
Qu’on pouvait quantifier seulement sur le plan physico-chimique
C’était avant tout des expérimentations à oser
Comme autant de solutions à ajuster dans le réel
Pour obtenir les résultats positifs pressentis
C’était courir le risque de la chance et de l’innovation
C’était l’histoire d’une approche de l’environnement
Qui ne serait pas seulement techniciste
Mais qui serait, à coup sûr,
Nous le voulions, progressiste
car
C’était l’histoire d’un désir…